A la fois posture et métier, l’animateur-facilitateur reste pour beaucoup un concept flou que cet article vise justement à éclaircir.

Rendre les outils accessibles, stimuler les échanges et l’intelligence collective, produire un livrable, telles sont les missions habituelles du facilitateur. Pour atteindre ces objectifs, le facilitateur ne suit ni un schéma vertical (où le savoir est strictement descendant), ni un schéma en étoile (où les apprentissages sont impulsés par le formateur). Et pour cause, il n’a pas pour but de transmettre des connaissances, mais bien de soutenir, mettre en lumière et accompagner. Ainsi dans le cas du formateur en ludopédagogie, du formateur en FOAD (Formation Ouverte et A Distance), de l’animateur chargé de mettre en œuvre de la pairagogie ou toute autre forme d’intelligence collective, etc. 

L’animateur-facilitateur s’inscrit dans une logique de co-développement où nul n’est dépositaire du savoir mais où les apprentissages naissent des interactions. 

Présenté de cette façon, on pourrait croire que les échanges se déroulent de façon un peu hasardeuse. En réalité, le facilitateur garde continuellement à l’esprit son objectif pédagogique (besoin du client) et cadre le débat en conséquence. Progressivement, grâce à son regard extérieur, il fait aboutir les participants à une prise de conscience ou une solution. 

C’est en fait, dans le domaine de la formation professionnelle, un autre rapport à la connaissance et donc une autre manière d’exercer son métier de formateur. 

Suis-je de la trempe des facilitateurs ?

Si l’on devait établir une fiche de poste pour le métier d’animateur-facilitateur, cela donnerait à peu près ceci :

Pour un facilitateur, une bonne posture consiste à saisir la vie organique du groupe, savoir bien expliciter l'intention des commanditaires (le pourquoi de l’action de formation mise en œuvre), à tenir un cadre et enfin à intervenir dans l’atelier/la session aux moments opportuns. 

Neutralité et bienveillance (notamment dans l’écoute) sont ses soft-skills les plus incontournables. Mais il ne faut pas oublier non plus la capacité à connecter les gens entre eux en faisant preuve de créativité, et aussi d’humilité pour ne pas se mettre en avant et/ou influencer les réflexions du groupe. 

A cette fin, l’animateur-facilitateur doit savoir actionner les différents leviers de la dynamique de groupe pour réussir à fédérer les participants et les amener à penser progressivement hors du cadre.

Le facilitateur n’est pas le chef qui va diriger, ni le psy qui va soigner, ni le coach qui va épauler au quotidien, ni le subordonné qui va œuvrer à la place des participants. Il doit faciliter l’intelligence collective et non faciliter le travail des stagiaires. Au contraire ! Tout au long de la formation, l’animateur-facilitateur doit débusquer les observateurs pour les faire sortir de leur passivité et les intégrer avec succès à la dynamique du groupe. Il doit également être capable de canaliser les participants trop bavards ou trop autoritaires dont la posture dominatrice pourrait inhiber les autres. Il sait tour à tour donner la parole, interroger et recentrer.

Comme le dit Anne Rysnaer, cheffe de projet – nouvelles pédagogies : « un bon facilitateur crée un climat favorable à l’émergence de l’intelligence collective et la collaboration à travers sa posture et ses techniques d’animation ».

Quelques exemples de techniques de « facilitation »

Une bonne dynamique de groupe suppose en premier lieu de comprendre les réactions du groupe et son fonctionnement a priori. Pour cela, les tours de parole, jeux de rôle, brainstormings, etc. aident l’animateur-facilitateur à « prendre la température » de son groupe et cerner plus précisément les différents profils qui le composent. 

Quel que soit son point de départ, le groupe devra apprendre à travailler en commun avec la même spontanéité et la même agilité que les joueurs d’une équipe sportive professionnelle. Tous les participants devront obligatoirement tomber les masques et surtout « entrer dans la danse ». Pour cette raison, des outils pédagogiques vecteurs d’ambiance comme les warm-up ou icebreakers sont particulièrement chers aux facilitateurs. 

Mais ce n’est pas tout. Amener ses stagiaires à penser hors du cadre, cela implique d’utiliser des techniques elles-mêmes originales et « décalées » (entendez par-là, détachées de la réalité du sujet). La ludopédagogie, les jeux de Thiagi, les escape games, etc. sont des pistes intéressantes pour susciter l’adhésion et stimuler l’émergence d’idées nouvelles.  

Penser hors du cadre implique également de savoir pousser la réflexion au-delà de ses limites habituelles. En face de toute question épineuse, de toute difficulté, les participants opposeront une réponse a priori, souvent stéréotypée, qui les excuse et les déresponsabilise. « Pourquoi les ventes ont-elles baissé ? », « Parce qu’il y a la crise économique ». 

L’animateur-facilitateur ne saurait évidemment se contenter de ce type de réponse. Il aura ainsi à cœur de creuser, à coup de « pourquoi », les propositions du groupe afin d’en révéler le caractère arbitraire et souvent caricatural. Il ouvrira ainsi de nouveaux espaces à la prise de conscience et à la réflexion. Les réponses figées entreront en mouvement par ce jeu de questions/réponses et le groupe, « malgré lui », parcourra du chemin… 

Dans quels cas recourir plutôt à un facilitateur qu’à un formateur classique ? 

Il serait bien entendu absurde de recourir à un facilitateur dans le cadre d’une formation en langues ou en informatique dans lesquelles le rôle premier du formateur est de dispenser un savoir théorique. En effet, l’intelligence collective prend nécessairement appui sur une expérience et n’est donc pas productive dans le contexte d’un apprentissage entièrement nouveau. 

Le facilitateur est en revanche nécessaire dans le cadre, par exemple, d’une formation à distance où il s’agit d’aider à la prise en main d’un outil et à l’émergence d’une dynamique de groupe en dépit des barrières imposées par l’e-learning. Dans ce cadre, le rôle du formateur n’est effectivement plus de transmettre du savoir mais de rendre ce savoir accessible et de favoriser par tous les moyens son assimilation. 

Dans le contexte de la pairagogie, on privilégiera également cette posture « facilitatrice ». Par exemple, une formation en leadership à destination d’un groupe de managers ne saurait être abordée efficacement d’une manière didactique, à grand renfort de slides. Lorsque des pairs sont rassemblés autour d’une question qu’ils partagent, un bon animateur-facilitateur tirera meilleur profit de son groupe qu’un formateur classique qui peinera à ancrer les nouvelles notions sur le vécu individuel de chacun des participants. D'autant plus que le formateur classique ayant une posture de sachant, les participants seront moins enclins à donner leur opinion.    

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